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3 août 2009

Les soins solaires, c'est l'enfer !

La protection solaire est un marché extrêmement complexe : difficile pour les marques de s'y faire une place au soleil ! Je ne vous apprends rien : c'est un segment ultra-saisonnier, toutes les nouveautés surviennent sur le marché en même temps, toutes les animations commerciales sont concentrées sur la même période, alors même que le consommateur va acheter un nombre très limité de produit... Bref, c'est l'enfer ! La distribution, surtout sélective, se montre d'ailleurs méfiante vis-à-vis de ce marché imprévisible, lié aux aléas de la météo et sur lequel, une fois passée la saison, le stock restant est invendable.

Tout l'enjeu est de faire la différence en une saison. Et de se renouveller chaque année.

La règlementation s'est récemment durcie pour uniformiser le système des indices, et les marques ont répondu à cette contrainte en augmentant leur offre sur les indices plus élevés. Même si chaque marque a une image plus ou moins sérieuse qui va jouer sur la confiance du consommateur, la différenciation produit ne peut se jouer sur le niveau de protection puisque les indices sont uniformisés. Les besoins sont d'ailleurs assez basiques a priori. Mais en parallèle, la formulation s'améliore pour des textures plus légères, plus agréables etc...

Conséquence, plus les acteurs ont une légitimité forte sur le sérieux et la performance (en mass et en pharmacie), plus ils mettent d'ailleurs l'accent sur le plaisir pour élargir leur promesse : Garnier avec sa gamme de laits 'Léger & Soyeux' ou son lait amplificateur de bronzage, Nivea avec son spray invisible... A l'autre extrêmité, les marques du selectif s'attachent à renforcer leurs gammes sur les indices élevés, comme pour contrarier leur image trop... frivole ?

Sous-segments : enfants, bio, UV...

Le marché est par essence limité. Pour susciter l'intérêt et valoriser l'offre, il est naturel de proposer de nouvelles segmentations. Lancaster, référence solaire du selectif, en a fait sa stratégie : chaque année, la marque lance de nouvelles mini-gammes pour élargir son emprise, cette année avec Sun Men et Sun Sport (après les solaires premium, le maquillage solaire, les solaires minceur etc...). Les gammes Enfants sont désormais incontournables, notamment en mass où de nombreuses nouveautés sont proposées (Garnier, Nivea...). La vague verte touche bien sûr également le solaire, des petites marques (H2O, Lovea) étant actives sur le segment avec des gammes bio. Clarins et Shu Uemura renforce le marché de la protection 'city' avec des produits UV (UV Armor, UV Plus), petites flaconnettes contenant des filtres à utiliser en ville plutôt que sur la plage, directement adaptées de l'Asie où ces produits cartonnent.

Vive le 2 en 1

Le 2 en 1 est un outil de différenciation. Le selectif en use notamment pour justifier son positionnement prix. Les après-soleil, soins plaisir par excellence, ont ainsi la cote : SOS Coups de Soleil chez Clarins, Lait prolongateur légèrement auto-bronzant chez Sisley... Même esprit plaisir pour le Gloss Cristal protecteur de Biotherm. Le super luxe n'est pas en reste, avec la gamme premium Re-Nutriv de Lauder qui s'enrichit d'une mini-gamme solaire anti-âge, dans la lignée de Sunleÿa (Sisley) ou Absolue (Lancôme).

Le 2 en 1 est également présent en pharmacie, incarné par Somatoline et son amincissant solaire, ou l'anti-taches brunes Melascreen. En mass, L'Oréal Solar Expertise mise également sur l'anti-taches brunes.

S'agissant des nouveautés produit, on voit donc bien les lignes de force qui structurent le marché : la performance (pas uniquement en terme de protection, comme l'indique le développement des produits 2 en 1) et le plaisir, aidé par l'amélioration des formulations. Le segment des solaires est très révélateur de l'inspiration des marketeurs pour animer et faire vivre un marché a priori morne, basique et sans grande possibilité de croissance. A méditer sur bien d'autres segments dits 'basiques' ! Sans doute le démaquillage, les soins du corps, le maquillage des ongles et quelques autres doivent bénéficier de la même créativité marketing pour se faire une place de choix dans les linéaires et dans le coeur des consommateurs.

Il est temps pour moi de faire les valises pour la trêve estivale, je vous retrouve à la rentrée pour de nouvelles aventures. Je vous souhaite à tous un très bel été.

Crédit photo : Getty Images

23 juin 2009

Le whitening devient mondial

Les habitudes cosmétiques sont façonnées par des dominantes culturelles, qui impliquent des fortes disparités dans les comportements de consommation d'une région du monde à l'autre. Mais, retravaillée et adaptée, une constante régionale peut se diffuser à d'autres zones, notamment sous l'influence des marques internationales qui cherchent à mondialiser leurs succès. J'en avais déjà parlé au sujet de la problématique des pores, transmises de l'Asie aux Etats-Unis. Le marché du whitening en est un autre exemple.

Le whitening, essentiel en Asie

On les appelle whitening, lightening ou brightening, soins blanchissants ou éclaircissants... Le whitening est à l'origine un segment typiquement régional, limité à l'Asie. Pour faire très court, tant le sujet est complexe : un teint clair et transparent est un critère de beauté essentiel pour la femme asiatique, dont la peau est naturellement hyperpigmentée, ce qui peut génèrer l'apparition de taches brunes dès l'âge de 20 ans. Cette particularité a suscité le développement, depuis des décennies, de produits destinés à obtenir un teint plus clair en limitant la production de mélanine dans la peau ou en activant son élimination naturelle. Ce segment est aussi essentiel pour les femmes en Asie, particulièrement au Japon, que l'anti-âge en Europe.

Une étude de Global Industry Analysts (GIA), reprise dans cosmeticsdesign, prédit que le marché du whitening pourrait atteindre mondialement 10 milliards de dollar en 2015.

Localement, en Asie, le marché bénéficie de plusieurs phénomènes favorables. Le whitening, auparavant limité aux soins du visage féminins, connait un beau succès dans les soins du corps et dans les soins pour hommes. Par ailleurs, le développement rapide des marchés chinois et indiens viennent à leur tour renforcer ce segment.

Le whitening se propage à l'ouest

L'autre grande tendance, c'est la propagation du whitening aux marchés occidentaux. Au départ, la demande, timide, était portée par les touristes asiatiques présents en Europe et aux Etats-Unis, puis par le marché dit 'ethnique' de ces pays, c'est-à-dire né des besoins spécifiques des populations originaires d'Asie, ou d'Afrique, de ces mêmes pays. Mais l'hyperpigmentation étant liée à l'âge pour les peaux 'caucasiennes', le whitening prend naturellement position dans les gammes anti-âge occidentale : le thème de l'éclat ou des taches brunes est généralement associé à des actifs traitant de problématiques anti-âge plus classiques comme les rides ou la perte de fermeté, plus rarement en solo dans des gammes spécfiques 'taches brunes'.

Les marques jouent un rôle clé dans l'installation de ce thème du whitening dans les gammes occidentales. Elles peuvent ainsi rentabiliser à l'échelle mondiale des technologies cosmétiques développées au départ spécifiquement pour des gammes Asie. Elles enrichissent également les thèmes de l'anti-âge avec des propositions soit plus ciblées (taches brunes...), soit plus aspirationnelles (éclat, lumière du teint...) qui permettent de renouveller le discours anti-âge.


Tout cela nous rappelle que toute habitude locale recèle un potentiel global ! A méditer pour ouvrir de nouveaux marchés.

Photo : Dior

25 févr. 2009

Les marques de parfum et leurs limites

Toutes les grandes marques à succès ont leur limite, c'est vrai dans tous les secteurs, c'est aussi vrai dans l'univers du parfum. Dans la période plutôt favorable qui a précédé la crise, les marques, enhardies, ont justement tenté de repousser les limites et s'ouvrir de nouveaux territoires... la tendance pourrait justement se retourner en ces temps de disette.
- Ces limites peuvent être géographiques, lorsqu'une marque florissante dans tous les pays majeurs peinent à réiterer l'exploit dans un pays ou une zone donnée (Dior, éternel challenger aux US, ou Lauder, loin d'avoir l'équivalent de ses positions US sur le marché français des parfums). C'est évidemment encore plu vrai pour les marques dites 'régionales', dont le territoire d'expression, pour des raisons culturelles ou historiques, est plus limité encore.
- Ces limites peuvent être rencontrées lors de tentatives d'extension à de nouveaux métiers, par exemple de dupliquer un succès parfum dans l'univers du maquillage ou du soin (Givenchy, Mugler il y a quelques années, Azzaro dans le soin hommes).
- Enfin, ces limites peuvent être rencontrés au sein même du territoire parfum, lorsqu'il s'agit de conquérir de nouvelles cibles : les hommes pour une marque féminine, les femmes pour une marque masculine, la femme mature pour une marque typée jeune etc...

Ce dernier cas est passionnant. Lorsqu'une marque a la tentation d'attirer ceux qui lui étaient auparavant réfractaires, elle a l'obligation de se réinventer, de trouver dans ses gènes et dans ses codes ceux qui pourront plaire, tout en gommant ce qui pourrait déplaire. Inutile de dire qu'il faut bétonner son projet, car avant de tenter sa chance auprès du consommateur final, il faut avoir convaincu ses équipes en interne et ses partenaires externes (filiales, agents, distributeurs...) du pari à relever. La prise de risque est naturellement plus grande. Hugo Boss est en parfum une marque essentiellement masculine, dont les tentatives féminines ont été des flops : nouvel essai avec Boss Orange, cette fois avec une égérie, Sienna Miller, pour mettre toutes les chances de son côté. Azzaro, également très typé masculin, convoque simultanément son passé de couturier (pour AzzaroCouture) et une cible homme et femme (pour le duo Twin) en espérant également conquérir les femmes. Même stratégie de duo côté Cacharel (avec Amor Amor Tentations) pour les hommes, et le secret espoir de séduire également des femmes plus mûres que la cible ado habituelle pour la marque (après l'insuccès de Liberté). Ce combat sera également cette année celui de Nina Ricci, qui a les très jeunes avec Nina, les très mûres (!) avec l'Air du Temps, et entre les deux, une tranche d'âge pour l'instant oubliée.

Il suffit souvent d'un seul beau succès pour renverser la vapeur - Chanel l'a réalisé en retrouvant avec Allure Homme Sport une cible masculine un peu perdue de vue, idem pour Hermès avec Terre d'Hermès, Yves Saint-Laurent avec L'Homme, et en sens inverse, Armani Code Woman qui a réveillé la cible féminine d'Armani -, mais on le sait, les succès ne sont pas légion, et c'est encore plus vrai lorsqu'on se lance en territoire inconnu. On ne peut pas plaire à tout le monde.

Source photo : cosmeticnews

3 mars 2008

Etui parfumé : adieux les testeurs ?

Signalsurf me transmet une info parue sur Influencia : pour deux éditions limitées d'été d'Alien et AMen, Thierry Mugler utilise un procédé inédit pour faire découvrir la fragrance. Une fenêtre dans l'emballage s'ouvre sur un plastique parfumé à la fragrance, remplaçant ainsi échantillons et cartes à parfumer, des outils de vente moins adaptés à des éditions éphémères.

J'admire ces marques qui s'efforcent d'avoir toujours une longueur d'avance, de tester de nouveaux procédés, de sortir des sentiers battus. Mugler en a fait sa logique de fonctionnement depuis ses débuts, ouvrant ainsi de nouveaux horizons à d'autres marques moins aventureuses.

20 févr. 2008

2011 : les grandes tendances de la beauté selon Euromonitor

Le site de tendances WGSN fait le résumé d'une étude Euromonitor sur le marché mondial de la beauté, et conclut sur les grandes évolutions attendues à horizon 2011.

Ce qui va se renforcer

  • davantage de réglementation, notamment une définition plus stricte des labels "naturel" ou "bio", des obligations renforcées en matière d'innocuité, une plus grande protection contre la contrefaçon
  • des entreprises de dimension locales dans les grands marchés émergents (Russie, Bresil, Inde et Chine) vont devenir des acteurs mondiaux
  • les segmentations par style de vie, plus fines et plus précises, vont remplacer les segmentation demographique, trop vastes
Ce qui va diminuer
  • moins d'innovation ultra-technologique, car les consommateurs se montrent plus cyniques, ce qui va amener les marques à se concentrer davantage sur le développement de "meilleurs" produits en eux-mêmes (texture, résultat visible...), au-delà du discours marketing
  • la premiumisation, l'ultra-luxe vont diminuer du fait de l'érosion mondiale du pouvoir d'achat

31 oct. 2007

L'ivresse de la beauté : cosmétique et vin

Des produits de luxe vendus en supermarché ? Vous n'y pensez pas ! Et pourtant si, ces produits existent, ce sont les vins et spiritueux. Comme tout produit de luxe, ils véhiculent leur part de rêve, de sophistication, un art de vivre élégant et aspirationnel. Mais leur environnement de vente n'est pas toujours à la hauteur de cette exigence. En cela, on retrouve un premier point commun avec les parfums et cosmétiques qui doivent réussir à paraître exceptionnels même dans des linéaires qui peinent à faire rêver...

L'excellent blog So Wine constate que cosmétique et vin s'inspirent mutuellement dans la création produit, et que les exemples de ces échanges abondent. L'auteur du blog semble penser que c'est plutôt la cosmétique qui se nourrit de vin, j'avoue qu'il me semble que c'est plutôt un phénomène récent tandis que le marketing du vin a très bien su se nourrir, et depuis longtemps, des approches marketing de la cosmétiques pour moderniser ses atours... Mais sans entrer dans le débat de l'oeuf et de la poule, le panorama des initiatives cosmétiques inspirées du vin est en tout cas révélateur d'une tendance forte en cosmétique, particulièrement ces derniers temps.

Quand le vin inspire une marque...
Parmi les pionniers, bien sûr, Caudalie, et son concept initial reposant sur les polyphenols anti-oxydants issus des pépins de raisin. Un ingrédient qui n'est pourtant pas une exclusivité, mais que la marque a intelligemment exploité puis enrichi autour de l'univers du vin. Une très belle réussite du circuit pharmacie, qui pourrait même faire de l'ombre à certaines marques sélectives. La France n'a pas le monopole du vin, et les vins du nouveaux mondes peuvent aussi s'inspirer du modèle Caudalie : les soins Daviskin sont ainsi nés des vignobles californiens de la famille Mondavi.

Le soin n'est pas le seul segment concerné. La marque de cognac Courvoisier, très célèbre aux Etats-Unis, a ainsi lancé l'Edition Impériale, un parfum développé sous licence par Kraft International Marketing. Un lancement à première vue anecdotique, mais pas plus que les parfums Bugatti ou Jaguar, qui surfe sur des notions similaires : un art de vivre haut de gamme, très masculin, entre tradition et modernité.

Kilian Hennessy, qui appartient à la famille des cognacs Hennessy mais a essentiellement fait ses armes dans l'univers du parfum, ne s'y est pas trompé : si l'univers de sa toute jeune marque By Kilian évoque davantage la littérature du XVIIIe siècle, ses flacons ressourçables se remplissent à des fontaines qui évoquent immanquablement les fûts de cognac, ses fragrances jouent avec les notes d'absinthe et de rhum, clin d'oeil à ses origines.

Quand le vin inspire une gamme...
Deux marques du groupe LVMH se sont associées pour un cobranding inédit : le soin premium L'Or de Vie lancé par Dior s'appuie sur l'univers de Chateau d'Yquem. Les actifs sont ainsi extraits des sarments de vigne du "vin le plus cher au monde", qui prête également d'autres éléments clé de son territoire (codes coloriels... et prix extrêmement élevé).

Quand le vin inspire un produit...
Les arômes des vins et spiritueux, les cocktails les plus détonants sont très souvent à la source de l'inspiration des notes d'un parfum. Au même titre qu'une fleur ou un fruit, ils ont un pouvoir d'évocation immédiate pour le consommateur lorsqu'il s'agit de décrire une fragrance. Il est en revanche plus étonnant de voir le vin soit partie prenante de la fabrication d'un parfum ! Thierry Mugler sort pour Noël une édition limitée de très grand luxe, baptisée La Part des Anges, de son parfum fétiche Angel, dont le jus - retravaillé - a été vieilli dans les fûts de la maison de cognac Remy Martin. Une approche d'innovation process plus courante en soin ou en maquillage qu'en parfum, dont les étapes de maturation / macération sont extrêmement codifiées. L'idée, même dans un flacon habillée de cristaux Swarowski, me parait néanmoins plus adaptée à un parfum masculin qu'à un parfum féminin, vue la cible traditionnelle du cognac... Avec seulement 4742 exemplaires, la marque ne prend de toute façon pas vraiment le risque de séduire en masse.

Qu'est-ce que ce panorama nous apprend sur les parfums et cosmétiques ? La cosmétique est par essence un univers qui se nourrit d'autres univers, qui tire son inspiration d'autres imaginaires (couture, mode, cinéma, stars...). C'est donc tout naturellement que les vins et spiritueux viennent à leur tour nourrir les concepts de marque, porteurs valeurs hédonistes, d'excellence, de tradition, de luxe authentique. Ils viennent consolider la quête de légitimité, de "mythes fondateurs" des marques de cosmétique. Et plutôt de belle manière, non ?

24 oct. 2007

Balade de luxe avec un parfumeur-créateur

Le bloggeur Darkplanneur nous invite à une première balade de luxe, inaugurant un nouveau concept d'interviews destinées à nous faire découvrir les nouveaux talents du luxe contemporain. Premier invité : le parfumeur Blaise Mautin.

18 sept. 2007

Intuition ou études de marché ?

Dans son blog "idées jaunes", Mark cite une interview de Renzo Rosso, créateur de Diesel : "On avance à l’intuition, à la sensation, à la vibration. On n’effectue pas d’études de marché traditionnelles car quand elles arrivent, elles sont déjà obsolètes". Mark défend l'idée que les deux méthodes se tiennent, et qu'il faut simplement "choisir l’une des deux approches, s’y tenir dans la durée et y développer des compétences de pointe. Il s’agit de devenir le champion de l’intuition ou le champion des études." J'aime beaucoup cette idée. Et en matière de parfums et cosmétiques, je ferai confiance en premier lieu à... l'intutition.

Intitution vs étude

A moins d'avoir des budgets colossaux, on a tendance à réaliser des études somme toute assez légères au regard du marché. Même les grandes marques internationales peuvent rarement s'offrir des études dans de nombreux pays, avec un panel suffisamment grand. Dans ce contexte, difficile d'avoir des tests qui seront représentatifs d'un accueil réel du produit à travers le monde. Ces études visent souvent plus à conforter l'intuition de départ qu'à réellement prendre une décision : valent-elles donc le coût, l'effort, le temps passé ? Et à part pour des soins extrêmement ciblés nécessitant un panel par exemple de peaux présentant des problèmes bien précis, à part pour valider une intuition réellement fantaisiste et rupturiste, l'utilité réelle est moindre.

Il arrive également qu'on teste un élément du mix, alors qu'un produit est d'abord un ensemble de signes (fragrance ou formule, packaging, nom, communication, mise en scène en point de vente...). Par exemple, les parfums lancés sur le marché sont souvent très positivement évalués en 'sniff test', contre les grands leaders, et ce n'est en rien une garantie de succès. Le consommateur va au final avoir en face de lui un mix complet dont chaque élément participe à son choix, et pas seulement le parfum lui-même. Le 'sniff test' va au final servir à rassurer, à confirmer l'intuition initiale, à vérifier que le produit n'est pas rejeté... autant dire qu'on obtient des résultats proches en interrogeant une quinzaine de personnes de son entourage.

L'intuition est plus forte, encore faut-il s'y fier

Alors, me direz-vous, pourquoi les marques sont-elles si attachées aux études de marché ? Pour faire confiance à l'intuition, encore faut-il s'entourer de personnes intuitives. Cette lapalissade n'en est pas une, car c'est une qualité finalement assez rare. Les marques les plus fortes sont celles qui réussissent à attirer des profils fortement intuitifs, et surtout, à les laisser s'exprimer. Car c'est toujours plus facile de convaincre un manager inquiet en lui disant "98% du panel a apprécié le produit" que "j'ai une conviction forte sur ce produit". L'étude de marché est un palliatif à l'intime conviction.

Lorsque l'étude est utilisée pour la prise de décision, elle met d'abord en lumière ce qui est consensuel, ce qui est validé par la majorité des utilisateurs, ce qu'ils ne détestent pas. Le risque c'est évidemment le consensus mou, finir avec une offre lisse et sans risque qui ne déplait à personne, mais n'a sans doute pas la magie nécessaire pour émerveiller, étonner, détoner, fidéliser à long terme. Angel, FlowerbyKenzo ou même Chanel n°5 sentiraient-ils différemment si leurs créateurs s'étaient fondé sur des tests quantitatifs pour les valider ?

La beauté est un univers avant tout irrationnel, parce que dans l'acte d'achat interviennent de très nombreux facteurs non rationnels, irréfléchis, intangibles. Dès lors, comment rationaliser la création d'un produit qui sera choisi pour des raisons en grand partie irrationnelles ? Soyons solides sur les éléments tangibles, mais laissons l'intuition parler sur l'essentiel.

19 juil. 2007

Soin pour intellectuels

Qui a dit que la cosmétique était un univers totalement superficiel ? Vu sur cool hunting : la marque australienne de soins alternatifs Aesop, non contente d'adresser le message rassurant de formules naturelles, met un point d'honneur à adopter un discours marketing qui n'est pas surprometteur. La marque utilise ainsi des citations de grands penseurs pour appuyer son message holistique. Dernière en date, un starter kit pour hommes affiche cette citation d'Albert Einstein : "A man should look for what is, and not for what he thinks should be." Tout un programme.

Encore une excellente alerte de Signalsurf

13 juil. 2007

Et vous, vous faites quoi sur le web ?

L'Internet "social" (blogs, podcasts, sites de partage de video, encyclopédies collaboratives, sites de réseau, mondes virtuels...) croit très fortement : le trafic sur les sites concernés a explosé de +670% entre avril 2006 et 2007. Pour autant, seule une minorité d'internautes y joue un rôle actif et créent du contenu : 0.16% des utilisateurs de Youtube, 4.59% des utilisateurs de Wikipedia... Tel est le résultat d'une étude analysée par Business Week (lire l'article complet ici et ).

L'étude a également analysé la répartition par tranche d'âge de chaque profil : créateurs de contenu, critiques (qui commentent sur les blogs etc...), etc... jusqu'aux profils plus passifs de simples spectateurs, voire d'internautes qui n'utilisent pas ces nouveaux médias sociaux. Un nouvel outil pour cibler, selon les groupes d'âge, les campagnes et opérations de com on-line.


Vu sur rMen's blog

Et vous, vous faites quoi sur le web ?

17 juin 2007

La console qui rend belle au Japon

Saeki Chizu-San, sémillante sexagénaire japonaise, est l'une des grandes prêtresses des conseils beauté dans son pays, qu'elle livre à la télévision et dans les magazines spécialisés. Elle s'est associée à Konami pour développer le Dream Skincare, un logiciel de conseils de beauté sur Nintendo DS*. Cette nouveauté concilie habilement deux tendances majeures : la féminisation de la cible des jeux video, et le besoin de conseil beauté au Japon.


Premier décodage : les gamers se féminisent

Ce nouveau "jeu adulte" s'inscrit dans la veine du fameux programme d'entrainement mental du Dr Kawashima (ou brain training) qui fait un carton sur Nintendo DS. L'éditeur japonais a ciblé une clientèle plus agée, les quadragénaires et plus, rétifs aux jeux vidéos. Le programme s’est vendu à plus de 2 millions d’exemplaires au Japon en quelques semaines, avec une forte proportion de nouveaux consommateurs (joueurs n'ayant jamais joué auparavant, notamment des femmes). Aujourd'hui, plus de 10 millions de personnes à travers le monde utilisent ce logiciel de développement personnel régulièrement.

Une étude TNS démontre que, si le public traditionnel des jeux video reste stables, les éditeurs de jeu ont tout intérêt à élargir leur offre à destination de nouvelles cibles, plus âgées, plus féminines. Sur les 4 dernières années, les plus de 45 ans qui achètent des jeux vidéo pour leur usage personnel ont augmenté de 40%, les femmes joueuses de 67%, tandis que les ventes pour les hommes ont augmenté de 4 %. Une évolution à rebours de ce qui se passe dans la cosmétique, avec l'explosion des soins pour homme quand les produits pour femme restent l'essentiel du marché mais peu générateur de croissance.

L'initiative Dream Skincare est révélatrice de cette stratégie d'élargissement de cible pour Nintendo, qui va ainsi attirer des femmes, jeunes et moins jeunes, avec une offre beauté à la pointe.

Second décodage : les japonaises en quête de conseil

Comparer un magazine féminin "beauté" français et un magazine beauté japonais constitue un authentique choc culturel. Si le magazine français ressemble à n'importe quel magazine, avec un mix de brèves et d'articles de fond sur des sujets tendance, société, mode, beauté etc..., le magazine japonais ressemble plus nettement aux magazines informatiques : c'est uncatalogue de nouveauté présentées sous forme de banc d'essai avec des petits schémas et des pictogrammes expliquant l'utilisation de chaque produit et l'action de chaque ingrédient. Une vision très pragmatique mais plutôt indigeste pour une lectrice occidentale.

Culturellement, les japonaises (particulièrement les plus jeunes, qui constituent une cible majeure pour les marques cosmétiques) sont très peu intéressés par la dimension onirique des produits de beauté : elles cherchent avant tout à comprendre ce qu'est le produit, comment il fonctionne, quel résultat elles vont en tirer. Il suffit de comparer les cinq minutes que vont consacrer une conseillère beauté en Europe à orienter la cliente vers tel ou tel produit aux quarante-cinq minutes minimum que requiert le cérémonial du diagnostic de peau et de conseil indispensable à tout acte de vente en grand magasin japonais.
Elles sont donc avides de conseils, lisent ces magazines-catalogue avec attention et dévorent les sites comme @Cosme où les consommatrices viennent laisser leurs commentaires sur chaque produit vendu dans le commerce. L'achat beauté est ressenti comme plus impliquant car plus important socialement qu'en Europe (où il s'agit d'abord d'un achat plaisir), et traité avec sérieux.

Dream Skincare répond astucieusement aux besoins des consommatrices japonaises, en se calquant, y compris en terme de graphique, sur les magazines beauté qu'elles apprécient. En revanche, le principe ne sera pas évident à exporter hors d'Asie, contrairement à Brain Training, pour les raisons culturelles évoquées plus haut.

Crédit photos : Nintendo trouvé sur Akihabaranews

*Merci à Signalsurf pour m'avoir signalé l'info

29 mai 2007

Segments basiques = gisements de croissance !

Segments chouchous vs segments basiques

Certains segments de marché sont l'objet de toutes les attentions, de toutes les innovations. D'une part, ce sont des segments porteurs autorisant des positionnements prix élevés (et donc des marges confortables), mais également ce sont des achats impliquants pour lesquels les consommateurs sont plus exigeants, attendant toujours du neuf, de l'original, du différent, de l'exceptionnel. En cosmétique, c'est le cas de segments majeurs comme l'anti-âge, la minceur, les mascaras, le maquillage des lèvres...

Et puis, diamétralement opposés, il y a les segments basiques, traités comme tels par les marques. Ces petits segments moins rémunérateurs ronronnent, avec pour point commun une offre banalisée et peu différenciée entre les différents concurrents, des prix peu élevés, auxquels les consommateurs n'attachent a priori guère d'importance, des investissements R&D et marketing moindre. Mais dans un marché aussi concurrentiel que l'univers cosmétique, un segment peu concurrencé peut vite devenir une aubaine : les marques peuvent ainsi trouver un intérêt à revaloriser ces catégories délaissées.

Basiques ou "blue ocean" ?

Vous connaissez sans doute la théorie des blue oceans selon laquelle chaque entreprise doit s'extraire des grands segments de marché fortement concurrencés pour trouver ses petits eldorados plus sereins. Créer un nouveau segment est évidemment extrêmement rare et risqué, d'où la tentation de s'attaquer à des segments parfois importants en terme de volumes et moins valorisés. Comme l'hydratation visage, réveillée par des bénéfices ajoutés multiples, ou les produits de douche qui ont clairement gagné en attractivité par une sophistication de l'offre, on peut citer quelques segments subitement très actifs :


- Le maquillage des ongles - Sur ce segment en perte de vitesse, Bourjois s'érige en spécialiste avec des lancements réguliers apportant de vraies innovations, comme par le passé un applicateur spécifique pour réussir sa French Manucure, ou bientôt le vernis "1 seconde" avec pinceau extra-large et temps de séchage record. Une reprise en main salvatrice et rémunératrice.

- Le démaquillage - Sur un marché peu dynamique mais conséquent par son chiffre d'affaires, L'Oréal Paris lance Démaq'Expert, une gamme de démaquillants aux textures avant-gardistes. Ambiance backstage : "Chaque soir, faites-vous démaquiller par un professionnel". Au final, une offre différenciante, et un positionnement prix plus elevé.

- Les hydratants corps - Ce segment semblait averse à l'innovation, pourtant la vague des hydratants "ensoleillants" a ouvert la voie... maintenant très encombrée avec des lancements pléthoriques chez Roc, Evian, Nivea, Lancôme, Garnier, Dove etc. A quand la prochaine vogue ?

- Les colognes - Les eaux de cologne formaient le segment vieillissant par excellence, mais ces fragrances fraiches consensuelles trouvent une nouvelle jeunesse, comme en témoigne, pour ne citer que les grandes nouveautés masculines, les lancements de Allure Homme Cologne Sport chez Chanel ou Dior Homme Cologne. Une tradition réinterprétée avec succès.

Il faut donc parfois repérer sur le marché des segments a priori moins valorisés mais résistants et fidélisants, et oser les revisiter dans une perspective plus moderne. Si ces segments répondent encore à une motivation intime des consommateurs, on peut devancer et défier leurs attentes pour revitaliser, dynamiser ou anoblir des gisements de marché inexploités.

Crédit photo : Bourjois / Dior


21 mai 2007

Les empires du parfum

Cet article de Stratégies, sur les multinationales du parfum, date déjà un peu mais il porte un regard intéressant sur les dynamiques du marché. Un bémol cependant : des groupes majeurs du secteur, tels Lauder, Chanel et LVMH, sont pratiquement passés sous silence au profit de L'Oréal, Coty ou Procter qui ne sont représentatifs que d'une certaine approche du marché.

6 avr. 2007

Le blog qui inspire L'Oréal...

La stratégie du groupe L'Oréal serait-elle guidée par la lecture du blog La Gazette Cosmétique ? Tout semble le prouver, à lire cette note...

Voilà pour le clin d'oeil. Plus sérieusement, l'auteur de la Gazette relève 3 territoires d'exploration nouveaux pour le groupe L'Oréal, annonciateurs de futurs développements dans ces domaines :
1 - le bio, comme en témoigne le rachat de Sanoflore
2 - la pharmacopée indienne et l'ayurvédique, à la fois clé d'entrée pour l'immense marché indien et ultra-tendance aux USA
3 - la nutraceutique ou cosmétique orale, avec le projet Lumaé né de l'association de L'Oréal aux deux géants de l'agro-alimentaire Nestlé et Coca-Cola

On le voit, L'Oréal se montre ouvert aux tendances émergentes et prêt à investir fortement sur ces tendances pour tenir sa place de leader et ne pas se laisser grignoter ses parts de marché par ses petits concurrents.

29 mars 2007

C'est à boire qu'il vous faut... (air connu)

Trendsnow consacrait en mars une note aux boissons beauté, ou "drinkable skincare", soit le principe d'Essensis de Danone en version liquide...

- aux Etats-Unis, Enviga, né d'un partenariat entre Coca-Cola et Nestlé, est une boisson amincissante associant nutriments et caféine pour perdre jusqu'à 100 calories par jour (c'est généreux !)
- au Japon, Coca-cola a lancé "Love Body", boisson miracle à effet... wonderbra (?)
- aux Etats-Unis, la marque Borba propose les "Borba Skin Balance Waters" aux propriétés diverses, raffermissantes, anti-âge, clarifiantes …
- en France, BPW, joint-venture de Coca-Cola et Nestlé, s’associe avec L’Oréal pour créer "Lumaé", future boisson cosmétique à effet cosmétique. Lancement est prévu pour 2008.


Quel avenir pour tous ces produits ? L'un des principaux freins au succès de la cosmétique orale reste l'observance, c'est-à-dire la prise du traitement sur la durée : c'est contraignant au quotidien, les résultats sont à voir exclusivement sur le long terme, d'où un risque fort d'abandon. Mais la contrainte de prendre des petites gélules, proches par leur forme de médicaments, est en partie corrigée lorsqu'il s'agit de boissons aux goûts attrayants. Sans créer de raz-de-marée, et au-delà de l'évident problème de crédibilité, ces produits peuvent se faire leur place au soleil et apporter leur contribution à deux segments en constante quête d'innovation, la cosmétique orale et le rayon boisson aromatisée.


Crédit photo : Enviga, issu du blog trendsnow

6 mars 2007

Cobranding cosmétique

Le cobranding se définit comme l'association de deux marques distinctes dans la création d'un même produit. Ces opérations conjointes sont évidemment légion dans l'univers des biens de consommation, où l'influence des marques est décisive. La cosmétique utilise-t-elle assez la méthode ?

Les règles d'un cobranding réussi

Dans le magazine Management [1], Valérie Isabel, consultante indépendante en partenariat marketing, consacre un article aux 4 règles du cobranding réussi. L’association de deux marques sur un même produit doit répondre à 4 critères :

1 - Assembler des marques de même notoriété
Un consommateur ne s’intéressera au produit co-signé et co-siglé que s’il connaît déjà les deux noms associés. On parle de cobranding fonctionnel lorsque les deux marques, partageant leur expertise, créent ensemble un nouveau produit qu’elles commercialisent sous leur deux marques, par exemple le rasoir électrique Philips contenant de la crème hydratante Nivea, permettant à Philips de développer une expertise cosmétique quand Nivea renforce son audience masculine. On parle de cobranding conceptuel quand il s’agit uniquement d’une alliance ponctuelle sur un produit préexistant et simplement relooké, telles les sucrettes Canderel signées Karl Lagerfeld.

2 - Réunir deux partenaires aux valeurs communes dans un projet cohérent
Pour un mariage réussi, il faut que la cohérence du projet paraisse évident pour le consommateur, comme les sèche-cheveux Remington cobrandés par Dessange. Cela n’exclut pas l’alliance du signature haut de gamme et d’une marque grand public, telles les opérations Karl Lagerfeld pour H&M ou Paul Smith pour Habitat.

3 - Apporter un « plus » au consommateur
Quel bénéfice cette association apporte-t-elle au consommateur ? La Maaf s’engageait par exemple à baisser les cotisations des adhérents qui choisissaient le yaourt anti-cholestérol Fruit d’Or pro-activ. Et quand Dolce & Gabbana designe des portables Motorola ou Prada des mobiles LG, ils choisissent les modèles les plus high tech en leur conférant une touche design sans égal.

4 - Créer un avantage concurrentiel
L’idéal pour une alliance de cobranding, c’est d’ouvrir de nouveaux marchés aux deux partenaires, comme l’alliance de Nestlé aux constructeurs Krups et Magimix pour la fabrication des cafetières Nespresso.

Cobranding en cosmétique ?

La cosmétique est par principe un secteur qui cherche son inspiration dans d’autres secteurs, la mode évidemment, qui a donné naissance à des marques leaders du secteur, tout comme d'autres univers professionnels connexes à la beauté : dermatologues, makeup artists, parfumeurs-créateurs… Quel lancement ne se base pas sur l'apport d'un élément extérieur (photographe reconnu, célébrité-égérie, sculpteur participant au packaging, laboratoire de renom impliqué dans la formulation...) largement cité et commenté dans chaque élément du mix ?

Etonnamment, en revanche, le cobranding n'est pas la règle, comme si chaque marque craignait de se fondre dans l'alliance. J'ai relevé cependant plusieurs initiatives récentes, dont je ne peux malheureusement pas connaître le succès ou l'insuccès mais qui me paraissent marquantes parce qu'elles relèvent d'une association d'expertises originale.

- Christian Lacroix crée des colorations trendy pour Henkel il y a quelques années : dans l'univers de la coloration capillaire, l'expertise couleur appartient plutôt au coiffeur professionnel. L'idée de faire appel à un couturier, particulièrement connu pour son art de la couleur, sort des sentiers battus.

- Emilio Pucci habille le maquillage Guerlain : la dernière collection de maquillage Guerlain, notamment une nouvelle édition des fameuses Météorites, revêt le canevas coloré de la maison Pucci. Le groupe LVMH fait coup double avec deux marques qui lui appartiennent : Guerlain crée l'évènement avec son maquillage, et en asseoit le repositionnement "tendance", tandis que Pucci, encore assez peu connu, gagne en notoriété, et teste peut-être sa capacité d'attraction sur le segment beauté-cosmétique avant de lancer ses propres produits ?

- L'Oréal lance le palper-rouler avec Philips : fort du succès de son amincissant Perfect Slim, L'Oréal lance en grande distribution le kit Perfect Slim Pro contenant un appareil de massage signé Philips et un concentré minceur L'Oréal, pour un prix relativement élevé de 59.90 euros. En pleine vogue des "machines-beauté" (Wellbox pour le corps, appareil de dermabrasion chez Roc...), ce kit permet à L'Oréal de ne pas laisser échapper un segment porteur, avec une vraie valeur ajoutée (et les marges qui vont avec), et de bénéficier de l'expertise Philips en matière de petit électro-ménager. Comme dans le cas du partenariat cité plus haut avec Nivea, Philips tire en retour avantage d'un élargissement de son activité dans le domaine de la beauté, crédibilisé par l'Oréal, leader incontesté du secteur.

- Dior lance une crème au Chateau d'Yquem : à nouveau deux marques du groupe LVMH s'associe sur un projet commun, en l'occurence l'Or de Vie, une gamme de cosmétique extrêmement chère signée Dior, dont le principe actif est directement issu des vignes du Chateau d'Yquem, l'un des vins les plus chers au monde. Dior associe son image au summum du luxe, justifiant un positionnement ultra-luxe pour la gamme, quand Chateau d'Yquem gagne en notoriété, notamment auprès d'un public féminin, grâce aux très nombreuses retombées presse que ce lancement ne manquera pas d'occasionner.

Ces quelques exemples démontrent l'intérêt, dans un secteur exclusivement porté par l'innovation, destiné à créer sans cesse la surprise, d'associer des marques a priori éloignées dans des projets communs. Ces alliances retiennent l'attention des distributeurs, des journalistes, des consommateurs, car ils profitent de la notoriété des deux partenaires et annoncent quelque chose d'inédit, de nouveau, donc digne d'intérêt.

[1] Management - Mars 2007

13 févr. 2007

Essensis : place à la beauté intérieure ?

Antoine Riboud avait pour maxime "l'innovation est une alliance entre recherche, marketing, instinct, imagination, produit et courage industriel". Danone, l'entreprise qu'il a mené au sommet, numéro un français de l'alimentaire et numéro un mondial des produits laitiers frais, démontre à nouveau sa capacité d'innovation avec le lancement d'Essensis, le premier yaourt cosmétique. La dermonutrition (cosmetofood ?), un segment porteur ?



L'Actimel de la beauté

Comme le rappelle Mark Raison dans son blog, les cultures asiatiques considèrent que l'alimentation est un acte de santé autant que de plaisir. L'industrie alimentaire japonaise propose avec succès aux consommateurs des produits alimentaires aux vertus médicales et cosmétiques parfois farfelues (guimauves au collagère pour lèvres pulpeuses…).

On ne parle pas ici de cosmétique orale, ces pilules dont Oenobiol est l'une des marques emblématiques, qui s'apparente davantage à des médicaments, sans vertu nutritive. Le lancement d'Essensis est davantage dans la veine d'Activia (ex-Bio) et surtout Actimel de Danone, deux pionniers des aliments qui "font du bien". Lancé en 1994, Actimel réalise 890 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2005 et sans doute le milliard en 2006 [1].

Essensis serait "le premier produit alimentaire courant qui nourrit la peau de l'intérieur", selon la directrice marketing de Danone. Les nutriments d'Essensis (huile de bourrache, antioxydants de thé vert, vitamine E) contribuent en effet à limiter la déperdition en eau des cellules, de l'ordre de 15% dès 6 semaines et jusqu'à 25% après 4 mois, à raison de 2 pots par jour. Soit plus d'un euro par jour d'investissement, puisque le pack de quatre unités sera vendu 2.05 euros [1]. Pour Danone, c'est le futur emblème laitier du groupe, un nouvel Actimel.

Et pour frapper les esprits, le packaging fuschia a été étudié pour rappeler les codes de l'industrie cosmétique, et, outre la version nature, des parfums gourmands sont proposés ( litchi-raisin blanc, framboise-grenade, pêche-abricot). 101 calories par pot tout de même, contre 60 calories pour un yaourt nature… Essensis est lancé en priorité en France et en Belgique, et sous forme de bouteille en Espagne et Italie afin de respecter les habitudes de consommation de ces 2 pays.

La controverse

Essensis soulève les inquiétudes du porte-parole de l'association de consommateur Que Choisir face au protocole de test de Danone (36 femmes ont testé Essensis pendant 6 mois) : « C'est dramatique. On est atterré par ce mélange des genres entre alimentation et cosmétologie. Mais en l'absence de contraintes légales sur les alicaments en France, le consommateur est obligé de faire confiance à Danone. Pour Actimel, au moins, le groupe pouvait se prévaloir de l'avis de l'Afssa – l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments – qui admettait en gros que le produit boostait légèrement les défenses immunitaires dans certains cas, notamment contre les diarrhées chez les enfants. Mais avec Essensis, on est dans l'arbitraire total : l'industriel assène mais ne fournit pas les preuves scientifiques de ses allégations. La dermonutrition est un segment très porteur, promis à un bel avenir comme en témoigne son essor fulgurant au Japon par exemple. Mais elle donne à l'alimentation une orientation qui l'éloigne de ses valeurs fondamentales. Ainsi, au-delà des promesses tenues ou non sur son épiderme, il ne faudrait pas que Madame Michu se gave d'Essensis en oubliant de manger sain, équilibré et en quantité raisonnable ».

Pour l'Expansion [1], cela est également renforcé par le fait que, s'agissant de revendications cosmétiques, la clientèle serait moins regardante que sur le volet santé. Lorsque Unilever sort une margarine contre le « mauvais » cholestérol ou que Nestlé s'attaque à l'ostéoporose et la maladie d'Alzheimer, les enjeux ne sont pas tout à fait les mêmes.

Avaler sa crème hydratante ?

A mon sens, l'initiative de Danone est l'évolution naturelle du marché de la beauté.
- Les consommateurs sont de plus en plus ouverts à des approches beauté holistiques, qui prennent en compte les problématiques beauté de manière plus globale.
- Les marques y répondent par des offres de soins globaux, comme en témoigne ces derniers temps l'essor de l'anti-âge global au détriment des gammes spécialistes, et par des communications orientées bien-être plus qu'efficacité.
- Par ailleurs, le lien entre alimentation et bien-être est évidemment réaffirmé par la vogue des alicaments, et plus spécifiquement la perception du lien soin oral/bienfait topique se renforce, ce dont profite le marché en plein essor des compléments de cosmétique orale. Cependant, les grands acteurs de la beauté sont restés timides sur ce marché, ne serait-ce que parce les règlementations, très différentes d'un pays à l'autre, ne permettent pas de véritable stratégie internationale, nécessaires pour qu'un projet soit viable dans les grands groupes.

Tous ces signaux de l'émergence d'un besoin appelaient donc une réponse de la part d'un grand groupe de l'alimentaire. Danone, par son positionnement santé/bien-être, est évidemment le mieux placé pour agir. Face à promesse d'hydratation somme toute assez basique, la publicité massive, et les animations en point de vente (tel un Beauty Bar au Printemps), devraient permettre de créer l'évènement.

[1] Source : L'Expansion

En savoir plus :
- l'article de l'Expansion sur les alicaments
- un dossier Danone sur les projets "santé" du groupe

Suivi du buzz en temps réel : tableau des blogs mentionnant Essensis sur les 30 derniers jours
Technorati Chart


Crédit photos : issues du blog X-Prime et du blog Brieuc 75

9 févr. 2007

Produits star maquillage : Chanel vs Dior

Deux notes successives du Sael Blog sont consacrées aux produits star maquillage des looks Noël de Chanel et Dior. Ces deux marques ont popularisé le principe des produits star saisonniers en maquillage et rivalisent de créativité et d'ingéniosité pour proposer, à chaque saison, un produit qui sort des sentiers battus, suscite des retombées presse en masse et attire dans les points de vente les fashion addicts désireuses de s'offrir l'objet-star, disponible en quantités limitées et pour une période donnée. C'est une mécanique commerciale essentielle, tant elle met les collections de maquillage saisonniers sous les feux des projecteurs, drainant en magasin les inconditionnelles. Leurs principaux concurrents tentent également de prendre leur part du gâteau en lançant, pour le moment encore timidement, leur propre offre.

Faux jumeaux

Si à première vue Chanel et Dior semblent livrer la bataille avec les mêmes armes, les deux stratégies sont distinctes. Certes, à chaque saison son produit star, quatre fois par an. Mais le contenu (généralement une harmonie de plusieurs couleurs) et le contenant répondent à des mécaniques différentes.

Chanel utilise un boitier institutionnel (identiques aux autres boitiers de la gamme de maquillage) et joue sur des effets de matière dans la formule elle-même : que la texture soit à base de poudre ou plus crémeuse, elle reproduit en surface, grâce à des procédés de formulation très avancés, les couture d'un jeans, le décor des pavillons de Coromandels, paillettes du seguin... Une prouesse technique pour le plaisir des yeux.

Dior mise généralement sur des formules plus classiques mais les proposent dans un boitier innovant, à chaque fois inspiré des collections de couture Dior des saisons précédentes. Il s'agit d'abord et avant tout de s'offrir un accessoire, et l'étonnement est créé par la beauté et l'ingéniosité de l'objet. Bague, dé, mini-sac, coeur à pampilles renfermant des gloss ou des ombres à paupières, l'inspiration est autant la maroquinerie que la joaillerie. La prouesse est plus dans l'éxécution packaging que dans la formulation.

Cohérence, cohérence...

A chaque marque son positionnement, à chacune son image. Chanel creuse le sillon de l'intemporalité en réinterprétant dans la matière elle-même des codes couture éternels, et préfère le luxe intime dissimulé dans un banal boitier. Dior joue l'instantané, en créant le lien avec une collection éphémère de sa maison de couture, misant sur le visible, offrant un luxe plus show off et logotypé. Chaque stratégie vient donc renforcer le territoire intrinsèque de la marque, s'adressant sans doute à des typologies de femmes différentes.

Crédit photo : Chanel / Dior issues du Sael Blog

2 févr. 2007

Luxe et bio : go !

C'est un tournant pour le circuit sélectif comme pour le bio avec la première gamme bio lancée en selectif : la marque Stella Mac Cartney (groupe Yves Saint-Laurent) crée Care, ligne de soins bio certifiés Ecocert.

Pour ce lancement, il fallait la légitimité bio : la créatrice Stella Mac Cartney est très investie dans les mouvements alternatifs, et le bio est l'extension naturelle de ses engagements. Côté luxe, des galéniques exquises, issues de quatre années de recherche, des packagings sobres et élégants, un visuel pour le moins en rupture dans l'univers souvent lissé du bio... Ce lancement est doublement puissant : aux partisans du bio, la créatrice apporte la caution d'une démarche sincère et engagée, et aux fans du luxe répond le savoir-faire Yves Saint-Laurent Beauté.

L'initiative devrait être suivie avec attention par le sélectif : grandes marques et circuit bio considèrent souvent leurs univers comme parfaitement étanches, avec des orientations diamètralement opposées, des consommatrices parfaitement distinctes. C'est évidement loin de la vérité et Care pourrait donner des indications précises sur la manière dont ces univers se rejoignent.

D'autres articles sur Care :
- Mademoiselle Bio
- Beauté Addict
- TrendsNow

24 janv. 2007

La cosmétique de luxe fait-elle école ?

L'expérience de la cosmétique de luxe peut sans aucun doute se réveler très instructive pour de nombreux secteurs. En effet, la volonté de monter en gamme est partagée par un nombre croissant d'acteurs (grande consommation, textile), mais les recettes du luxe ne sont pas aisément transposables en l'état.
La cosmétique de luxe fait exception : c'est typiquement un secteur hybride, luxe par son image mais à grande diffusion dans sa structure, les grandes marques doivent jongler avec ces réalités opposées. Une double casquette dont j'ai déjà parlé dans une précédente note, que je vais tenter d'aborder différemment cette fois-ci.

Le luxe fait-il école ? Le Nouvel Economiste a interrogé des experts de différents secteurs, et leur premier constat est que la grande consommation (Procter, Unilever, Danone...), après avoir longtemps fourni au secteur du luxe des experts du marketing, appelle aujourd'hui les talents du luxe à la rescousse. Car le luxe fait recette, permet de sortir des logiques de prix rationnel et de faire exploser les marges (40-50% dans le luxe contre 13.5% chez Danone...), crée de nouvelles approches dans la gestion de l'image de marque, le développement des produits, la relation clients...

Pour s'inspirer du modèle du luxe, la grande consommation doit d'abord trouver une valeur ajoutée plus immatérielle à son image de marque, recréer le rêve. L'éthique et le bio sont des tendances porteuses pour lesquels les consommateurs sont prêts à payer plus cher. Des griffes bon marché tels Mango ou H&M parviennent à théâtraliser la marque (collection éphèmère de couturiers de renom, top-models dans les publicités). Même une proposition avec une image haut de gamme comme Monoprix Gourmet s'inscrit dans cette tendance. Il s'agit de se différencier des concurrents, de fidèliser les consommateurs, et d'améliorer les marges sur des segments de produits a priori bon marché.

L'esprit du luxe dans les produits grand public prend notamment de la place dans les phases amont de développement des nouveautés, avec le recours à l'intuition. La newsletter marketing de l'ESCP-EAP note que les études quantitatives, rationnelles, perdent de leur pouvoir de prédiction face aux revirements incessants dans le comportement des consommateurs, d'où un retour en force des études qualitatives et prospectives. Il ne s'agit pas d'une nuance mais d'une remise en cause d'un principe fondamental : car les études quantitatives mettent en lumière des tendances fortes et massives, des envies communément partagées par les consommateurs, alors que les études prospectives s'appuient d'abord sur des "signaux faibles", des besoins encore minoritaires, dont on estime qu'ils pourraient s'avérer de plus grande ampleur. Cette approche moins rationnelle, plus intuitive, permet de débanaliser et différencier l'offre. Elle est évidemment plus risquée. Ce sont ces études prospectives qui ont mis en valeur certaines des tendances qui valorisent aujourd'hui l'offre grande conso : le marketing tribal, le marketing écologique et bio, l'approche expérientielle...

J'ai déjà parlé dans ce blog de la fameuse "shopping experience", cette volonté communément partagée par les marques de luxe de ritualiser et théâtraliser l'acte d'achat pour le rendre moins banal, plus marquant, plus émotionnel. Si on entre toujours dans une parfumerie ou un grand magasin pour y être guidé, servi, conseillé, les marques et les distributeurs (Sephora y excelle avec la création de services, d'animations...) ont bien saisi qu'il fallait aller plus loin. C'est une tendance tout aussi forte pour des produits plus basiques, qu'il s'agit de rendre plus émotionnels. La même newsletter marketing m'apprend que le cinquième site touristique français n'est ni le Musée d'Orsay ni Versailles, mais un magasin spécialisé du 12e arrondissement : Surcouf ! L'enseigne est parvenu à réenchanter l'acte d'achat dans l'informatique en transformant la surface de vente en scène de spectacle, à l'image de Natures & Découverte et Résonance, les librairies américaines Chapters etc... In fine, cette expérience plus forte justifie plus naturellement une politique tarifaire plus élitiste.

La cosmétique en général, et la cosmétique sélective en particulier, est également un secteur où on sait particulièrement gérer un afflux de nouveautés tout en conservant une cohérence de ligne, de marque. Si pendant des années, des acteurs de l'alimentation par exemple ont surtout excellé à gérer leur capital produit, la tendance est aujourd'hui à un renouvellement plus rapide. Coca-Cola est un exemple parlant : jusqu'à une période récente il fallait se contenter du choix entre le Coca-Cola original et sa version Light, ces dernières années le rythme d'innovation s'est accéléré avec les versions "vanille", "lemon", "lime", "blak", "cherry"... Autant de flankers, comme on dit pour un parfum, pour lesquels la cosmétique pourrait apporter une expérience sans égal.