Second life en beauté
La cosmétique et les parfums doivent-ils investir Second Life ? Maquillage, parfum et soin ont-ils leur place dans cet univers virtuel 3D qui fédère 1 millions de connectés réguliers (source : Marie-Claire avril 2007) ? 1 million, c'est peu pour une marque de grande consommation habituée à viser des groupes de consommateur nettement plus large, mais c'est tentant pour des marques plus sélectives coutumières de plan de communication plus ciblé...
Consommation virtuelle
Première opportunité pour une marque : prendre part purement et simplement à l'univers Second Life, vendre ses produits puisque les avatars virtuels consomment comme leurs alter ego de la vie réelle... Une étude exploratoire réalisée en interrogeant des accros de Second Life confirme combien cet univers virtuel est d'abord dédié à des activités ludiques, plaisantes, agréables. On peut donc considérer que l'univers de la beauté y a toute sa place, et que le consommateur virtuel est susceptible de dépenser ses fameux Linden Dollars virtuels en produis de beauté et en parfums, comme il le fait dans la vie réel. Pour autant, l'avatar a-t-il réellement besoin de soins (quel problème de peau peut avoir un avatar ?), de maquillage (l'avatar peut être maquillé dès le départ), de parfum (faute... d'odorat virtuel) ?
Si l'on prend l'exemple du parfum, deux créatrices françaises, Arkady Shatzkin et Babeth Kaupas, ont courageusement choisi de se lancer, en créant des petits nuages de molécules odorantes qui encerclent les avatars pour matérialiser le parfum qu'ils portent (source : SLObserver, le blog qui suit l'actu de Second Life). Packaging, texte lyrique, nom ludique : à défaut de parfum, tout le marketing qui l'entoure habituellement y est...
Cependant, difficile pour une marque d'imaginer rentabiliser sa présence sur SL par sa seule boutique virtuelle. En revanche, il reste toujours l'intérêt médiatique croissant pour Second Life qui permet au jeu d'en valoir la chandelle.
Second Life, plateforme RP ?
Quand Fred Cavazza s'interroge sur l'utilité de Second Life, il indique qu'il le voit davantage comme un média. Or il faut bien constater que les marques l'utilisent comme tel : elles ne sont pas dans une logique de participation à la construction de l'univers virtuel second life, elles font une opération de promotion ponctuelle et ciblée. Elles visent en premier lieu les utilisateurs de Second Life, et plus largement ceux qui auront vent des opérations de communication sur Second Life via le buzz généré par ces initiatives. Quand Victoire de Castellane inaugure une boutique Dior Joaillerie sur Second Life, il ne s'agit pas tant de participer à la construction de l'univers Second Life qu'à faire la promotion des produits auprès des utilisateurs via un showroom Second Life dédié, et surtout de faire parler de soi dans la vie réelle.
Lu sur SLObserver, l’Oréal Paris organise l'election de Miss Second life, en conclusion d'un défilé qui se déroulera sur le podium L’Oréal Paris fin mars 2007, sur le thème "Glamour Naturel", inspirateur des dernières collections maquillages, soins et colorations de L’Oréal Paris. Les participants doivent adresser par mail la photo de leur avatar Second Life et un texte de présentation, et un jury d’experts "real life" sélectionnera la gagnante du concours. Son avatar apparaitra sur le site officiel de la marque L’Oréal Paris, elle recevra des produits exclusifs et une place de top modèle dans l’agence de Second life Aspire Model. Une animatrice beauté L’Oréal Paris sera également présente et pourra répondre à vos questions, et vous conseiller dans le choix de vos produits.
Pour lancer son nouveau parfum Fleur du Mâle, Jean-Paul Gaultier organise une garden party sur Second Life. 100 fleurs blanches sont offertes aux résidents de Second Life, pour être cueillie, mise à la boutonnière de l'avatar, offerte ou replantée dans son jardin virtuel. Fanny m'a invité à l'évènement, j'ai malheureusement décliné, mais je suis sûr que les bloggeurs contactés y seront sensibles et participeront très activement au buzz autour du lancement. Des bannières, proposées aux bloggers, sonnent le compte à rebours avant l'éclosion des fleurs...
Côté groupe Coty, Calvin Klein lance CKin2u, dédié aux "technosexuals", c'est-à-dire la génération qui a mis les nouvelles technologies (SMS, chat, forum etc...) au coeur de sa vie sentimentale, avec l'ambition de recréer le succès de CKone dans les années 90. Bien évidemment, le lancement a lieu en simultané sur Second Life, en parfaite cohérence avec ce concept dans l'air du temps.
Lancôme aurait également une boutique virtuelle sur Second Life et aurait lancé un premier parfum virtuel...
Aujourd'hui, ce qui attire les marques, c'est d'abord et avant tout de démontrer leur esprit innovant et de générer par ce biais un buzz qui va bien au-delà des utilisateurs de Second Life. Second Life est donc vu en premier lieu comme un bon outil de relations publiques, avec un bon impact pour un coût très faible. L'initiative de Dior Joaillerie a décomplexé les acteurs du luxe et a été tellement reprise dans les médias on-line et traditionnels (y compris les quotidiens les moins enclins à faire la promotion des marques) qu'elle a réveillé l'appétit des marques.
Pour l'avenir, des opportunités... mais aussi des risques !
Ce constat n'est certes pas spécifique à l'univers de la cosmétique, mais l'aspect intangible / impalpable / invisible des produits cosmétiques les rend moins indispensables à Second Life. Et oui, paradoxalement, un produit trop "virtuel" comme un parfum aura du mal à trouver sa place dans un univers totalement virtuel où tout doit être visible à l'écran pour avoir un intérêt. Si le produit ne peut pas participer au quotidien de Second Life, alors la contribution mutuelle de ces deux univers ne peut passer, à mon sens, que par la plateforme de communication offerte par Second Life. Si cette plateforme perd en intérêt, la rencontre de ces univers perd en substance, tandis que si cette plateforme se renforce, le lien de la cosmétique et de Second Life se consolide également.
Quelle évolution prévoir ? Deux possibilités :
- passé l'engouement initial, à moyen terme, plus les marques vont sur Second Life, plus cela devient banal, peu surprenant. Dès lors, le buzz va aller en décroissant, et les marques seront moins intéressées par Second Life.
- ou bien Second Life devient avec le temps un média à part entière, naturellement intégré aux plans de communication des marques, certes banal mais incontournable, en raison du succès croissant de l'univers.
Le risque à moyen terme, c'est de voir les accros de Second Life se rebeller contre des stratégies trop opportunistes d'utilisation de Second Life à des fins purement publicitaires. Si la marque profite de Second Life uniquement pour lancer son produit puis s'en retire aussi vite, on pourrait bien se retrouver avec des buzz négatifs comme en son temps le fameux vrai-faux blog Vichy taillé en pièce par une blogosphère mécontente...
Crédit photo : Jean-Paul Gaultier
Ils parlent de cette note et apportent leur propre éclairage sur le sujet :
- Galienni
- Culture Buzz
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire