13 août 2008

Bio et distribution : pour le meilleur ou pour le pire ?

On se réjouissait initalement de voir la cosmétique conventionnelle investir dans des petites marques bio : Clarins avec Kibio, L'Oréal avec Sanoflore, Yves Rocher avec Terre d'Oc... Bien sûr, certains peuvent légitimement se méfier de l'arrivée du 'grand capital' dans l'univers préservé du bio, mais, pour les tenants d'une démocratisation du bio, ces partenariats doivent apporter de nouveaux moyens de développement à ces marques, et permettre au bio de gagner en visibité. En revanche, Mademoiselle Bio s'inquiète de l'entrée des marques de distributeur sur le bio et je dois convenir que je partage son inquiétude.

Je l'ai déjà indiqué sur ce blog : pour les consommateurs, le scénario idéal serait que le bio s'impose progressivement comme une norme du marché. D'abord promu par de petites marques alternatives, le bio serait repris et développé par de grandes marques du selectif, de la pharmacie, puis de la grande distribution, qui sauraient le marketer pour le faire connaître et apprécier de tous, puis, en fin de course, les distributeurs s'empareraient du bio pour leurs marques à petit prix. Cette évolution serait moins sans doute moins en phase avec la philosophie bio, mais au moins serait-elle a priori positive pour le consommateur, dont l'accès au bio serait grandement simplifié et encouragé. Les grandes marques ont sans doute tardé à surfer sur la vague bio, toujours est-il que rien ne se passe comme prévu... et ce n'est pas forcément une bonne nouvelle.


Avant l'été, les médias spécialisés ont salué plusieurs initiatives de grands acteurs de la distribution cosmétique dans l'univers du bio : Marionnaud, Carrefour, Sephora, rejoints par Yves Rocher en octobre 2008 avec la ligne "Culture bio". Rappelons que, ironie de l'histoire, le fameux reportage d'Envoyé Spécial qui avait 'lancé' la vague bio en France il y a quelques années avait justement épinglé Yves Rocher sur le thème du vrai-faux bio : serait-ce une revanche sur cet épisode difficile pour la marque ?

La distribution tue-elle une potentielle poule aux oeufs d'or ?

Certains seront choqués de voir ainsi le bio transformé en un simple marché, loin de sa philosophie initiale. A l'inverse, on peut se réjouir de cette démocratisation rapide du bio, dont l'offre à petits prix des marques de distributeurs ne cesse de s'élargir. Mais même pour ceux qui approuvent cette large diffusion du bio, le tableau n'est pas tout rose :

- premièrement, la souplesse des critères bio autorise certaines entourloupes que ne manqueront pas d'exploiter certaines sociétés peu scrupuleuses pour minimiser la présence réelle de composants bio, au risque de porter le discrédit sur l'ensemble du segment. Lire ici une note pour le moins enervée sur le sujet, et une autre plus générale sur les problèmes d'authentification des démarches bio.

- deuxièmement, cette offre très bon marché et assez banale peut mettre en difficulté l'économie d'un secteur avant tout représenté par des PME, rendant le marché moins attractif pour les entreprises de cosmétique conventionnelle qui hésiteront avant de s'y engager. Or le bio n'a pas à mon sens vocation à rester dans sa petite forteresse : s'il est bon pour le consommateur, il doit prendre de plus en plus d'ampleur, et cela passera par son adoption par toutes les marques majeures du secteur... Du coup, ce qui pourrait devenir une norme de marché peut parfaitement (re)devenir marginal.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Pour moi le bio, c'est d'abord une philosophie de vie. Les grands groupes ne s'y intéresse que pour des raisons financières. Néanmoins je comprends le principe de démocratiser ce marché, et effectivement, plus la cosmétique est bio, mieux c'est pour le consommateur. D'accord avec ton analyse sur les risques de voir la distribution s'emparer du bio avant les marques.

Merci pour ta vision équilibrée du secteur, et ta manière de comprendre et expliciter chaque point de vue. Pas de sectarisme, c'est rare !

Anonyme a dit…

En effet, je te rejoins. Le fait que les marques conventionnelles ne se lancent pas (ou à reculons) sur le bio risque de porter préjudice au développement global du marché bio.
Il faudrait vraiment inviter ces marques et groupes à marier leur savoir-faire historique (la valorisation d'actifs ou d'ingrédients) aux bienfaits du bio. C'est ainsi que le bio pourrait en sortir grandi !

Anonyme a dit…

Bonjour, je trouve cet article très bien écrit, et j'aime bien la façon dont vous traitez les différents points de vue.
Je fais partie de ces consommateurs qui sont assez contents de cette démocratisation du bio même si je me doute bien que ce n'est pas par philosophie mais pour des raisons financières que les distributeurs le font.
Je me mets petit à petit au bio et je dois dire, et c'est peut-être idiot, que c'est depuis que mes marques habituelles s'y mettent. Un exemple: Forté Pharma. A la base on ne peut pas dire que ce soit une marque très clean et j'utilisais pourtant leurs produits...et bien je suis contente de savoir qu'ils ont sorti une gamme phytothérapie 100% bio et je l'utilise à la place des autres... Sur le site on trouve des infos sur le bio en plus : http://www.fortepharma.com/fr/conseils/dossiers-thematiques/Pages/bio.aspx

etc etc...breef je trouve ça bien....mais je me dis que je me fais sûrement berner aussi par toutes ces infos qui sortent de tous les côtés...