Intuition ou études de marché ?
Dans son blog "idées jaunes", Mark cite une interview de Renzo Rosso, créateur de Diesel : "On avance à l’intuition, à la sensation, à la vibration. On n’effectue pas d’études de marché traditionnelles car quand elles arrivent, elles sont déjà obsolètes". Mark défend l'idée que les deux méthodes se tiennent, et qu'il faut simplement "choisir l’une des deux approches, s’y tenir dans la durée et y développer des compétences de pointe. Il s’agit de devenir le champion de l’intuition ou le champion des études." J'aime beaucoup cette idée. Et en matière de parfums et cosmétiques, je ferai confiance en premier lieu à... l'intutition.
Intitution vs étude
A moins d'avoir des budgets colossaux, on a tendance à réaliser des études somme toute assez légères au regard du marché. Même les grandes marques internationales peuvent rarement s'offrir des études dans de nombreux pays, avec un panel suffisamment grand. Dans ce contexte, difficile d'avoir des tests qui seront représentatifs d'un accueil réel du produit à travers le monde. Ces études visent souvent plus à conforter l'intuition de départ qu'à réellement prendre une décision : valent-elles donc le coût, l'effort, le temps passé ? Et à part pour des soins extrêmement ciblés nécessitant un panel par exemple de peaux présentant des problèmes bien précis, à part pour valider une intuition réellement fantaisiste et rupturiste, l'utilité réelle est moindre.
Il arrive également qu'on teste un élément du mix, alors qu'un produit est d'abord un ensemble de signes (fragrance ou formule, packaging, nom, communication, mise en scène en point de vente...). Par exemple, les parfums lancés sur le marché sont souvent très positivement évalués en 'sniff test', contre les grands leaders, et ce n'est en rien une garantie de succès. Le consommateur va au final avoir en face de lui un mix complet dont chaque élément participe à son choix, et pas seulement le parfum lui-même. Le 'sniff test' va au final servir à rassurer, à confirmer l'intuition initiale, à vérifier que le produit n'est pas rejeté... autant dire qu'on obtient des résultats proches en interrogeant une quinzaine de personnes de son entourage.
L'intuition est plus forte, encore faut-il s'y fier
Alors, me direz-vous, pourquoi les marques sont-elles si attachées aux études de marché ? Pour faire confiance à l'intuition, encore faut-il s'entourer de personnes intuitives. Cette lapalissade n'en est pas une, car c'est une qualité finalement assez rare. Les marques les plus fortes sont celles qui réussissent à attirer des profils fortement intuitifs, et surtout, à les laisser s'exprimer. Car c'est toujours plus facile de convaincre un manager inquiet en lui disant "98% du panel a apprécié le produit" que "j'ai une conviction forte sur ce produit". L'étude de marché est un palliatif à l'intime conviction.
Lorsque l'étude est utilisée pour la prise de décision, elle met d'abord en lumière ce qui est consensuel, ce qui est validé par la majorité des utilisateurs, ce qu'ils ne détestent pas. Le risque c'est évidemment le consensus mou, finir avec une offre lisse et sans risque qui ne déplait à personne, mais n'a sans doute pas la magie nécessaire pour émerveiller, étonner, détoner, fidéliser à long terme. Angel, FlowerbyKenzo ou même Chanel n°5 sentiraient-ils différemment si leurs créateurs s'étaient fondé sur des tests quantitatifs pour les valider ?
La beauté est un univers avant tout irrationnel, parce que dans l'acte d'achat interviennent de très nombreux facteurs non rationnels, irréfléchis, intangibles. Dès lors, comment rationaliser la création d'un produit qui sera choisi pour des raisons en grand partie irrationnelles ? Soyons solides sur les éléments tangibles, mais laissons l'intuition parler sur l'essentiel.
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